Que signifie « appartenir à un groupe » lorsque les pratiques communautaires s'estompent ou sont au contraire le prétexte d’un rejet de l’autre ? Les discours jouent à cet égard un rôle crucial : ce sont à travers eux que les individus donnent du sens à leurs relations sociales, les font naître, exister, se transformer. Les textes réunis dans ce dossier visent à rendre compte de ces constructions discursives. Elles se donnent à voir dans la mise en question, par les locuteurs eux-mêmes, des dénominations qui réfèrent aux groupes – par exemple pieds-noirs, harkis ou Algériens dans l’article de Mailys Kydjian – ou des désignations du lien censé les unir – la « nationalité » dans l’article de Suzanne Forbes et Anna Plassart ou le « patriotisme » dans celui de Marie Plassart. Elles peuvent même être saisies au croisement des deux dimensions, comme dans le cas d’Amnesty International, en quête d’un principe de regroupement – l’« expertise » ou l’« engagement » ? – à même d’atténuer les distinctions entre le groupe des « salariés » et le groupe des « bénévoles » (Amaia Errecart). Elles apparaissent enfin, de manière à la fois plus individuelle et plus indirecte, dans les dispositifs énonciatifs auxquels les individus ont recours lorsqu’ils évoquent leurs relations à des collectifs, comme le montre Thomas Liano à propos de Jean Genet et des Black Panthers.