Ce livre est une monographie sur l'histoire des théories du temps grammatical dans les grammaires françaises composées entre le XVIe et la fin du XIXe siècle. Il s’inscrit dans le champ de l’histoire et de l’épistémologie des idées linguistiques.
La mise en série des chapitres consacrés au temps dans les grammaires de la tradition française fait apparaître une remarquable continuité dans l’élaboration et la diffusion du savoir au cours de cette période. C’est la thèse principale défendue par ce livre, qui résulte elle-même des choix qui ont présidé à l’établissement du corpus : non pas quelques textes représentatifs des changements les plus significatifs, mais l’établissement d’une série présentant une granularité assez fine pour saisir toute la complexité des mouvements du changement.
Le point de départ dont se saisissent les premiers descripteurs des langues modernes est l’appareil théorique hérité des latins, principalement celui développé par Priscien. Ce cadre initial est ensuite aménagé et complété par les grammairiens du français dans leur effort pour rendre compte des données du vernaculaire.
Au sein du foisonnement impressionnant d’innovations suscité par l’exploration du champ de la sémantique verbale, la contribution de Port-Royal (1660) se distingue par sa portée. Les Messieurs réduisent en effet le modèle descriptif à un dispositif combinatoire permettant le repérage des événements dans un référentiel comportant un nombre fini de critères. Il en résulte une géométrisation de la sémantique temporelle dont les auteurs au cours des siècles suivants revendiquent le caractère formel, testent l’efficacité descriptive ou discutent la validité, jusque dans les grammaires générales les plus tardives du XIXe siècle, et au-delà chez des auteurs qui en recueillent l’héritage comme Jespersen et Reichenbach.