L'intérêt de rapprocher sociologie et didactiques est de plus en plus évident aux yeux des observateurs de l’éducation. D’une part, la sociologie ne peut saisir la contribution de l’école aux inégalités sociales sans entrer dans les mécanismes par lesquels les apprentissages se différencient, notamment entre élèves issus des divers groupes sociaux. De leur côté, les didactiques ne peuvent continuer à travailler leurs modèles en se figurant un élève « universel » et dont le rapport au savoir répond aux attentes des enseignants et aux implicites contenus dans les programmes.
Le présent dossier, partiellement tiré d’un colloque international tenu à la Haute école pédagogique de Lausanne en 2012, examine les possibilités de rapprochement entre les deux domaines d’études et les contraintes que cela suppose. Il présente les contributions de deux didacticiennes des mathématiques, d’un sociologue des curricula et de deux binômes sociologue/didacticien. Ces contributions sont des examens « en acte » des possibilités de rapprochement. Claire Margolinas considère, à partir de l’apprentissage de l’énumération, qu’il y a possibilité d’une intégration conceptuelle sans rupture entre sociologie et didactique. En revanche, les travaux des deux binômes (Patrick Rayou et Gérard Sensevy d’une part, Sylvain Broccolichi et Éric Roditi d’autre part) présentent une division du travail conceptuel.
Dans un autre type de démarche, Aurélie Chesnais, en tant que didacticienne et à partir d’un cas concret, et François Baluteau, en tant que sociologue et à partir d’une revue de littérature, montrent que l’on peut isoler analytiquement les effets didactiques (effets des choix des méthodes d’enseignement) des effets sociaux (effets des publics sur les méthodes d’enseignement). Ceci ouvre tout un champ de recherche à la collaboration entre sociologie et didactiques.